Nous avons lu avec intérêt le rapport de l'enquête inédite conduite par l’Ugict-CGT qui offre un panorama complet sur les conditions de travail et d’exercice de la responsabilité professionnelle durant le confinement.
34 000 réponses de tous statuts et secteurs professionnels dont une majorité de non syndiqués, recueillies en ligne entre le 8 et le 24 avril avec 100 questions pour appréhender l’ensemble des situations, télétravail, travail en présentiel ou arrêt d’activité et un angle spécifique aux salariés en responsabilité pour recueillir la vision de l’encadrement .
Nous sommes plus particulièrement arrêtés sur quatre grands enjeux qui devront être pris en compte lors de la phase de déconfinement :
1. Vécus différents
Des vécus et des populations différents en fonction que l'on ait pu télétravailler ( 70% des télétravailleurs sont cadres et professions intermédiaires) ou que l'on ait du travailler sur site (majoritairement les ouvriers/employés : 61%) et que l'on soit un homme ou une femme.
Cette situation devra être particulièrement prise en compte par les entreprises ayant du gérer cette situation duale qui risque ce ce prolonger avec notamment le sentiment pour une partie des travailleurs sur site (3 salariés sur 10 ) qui considèrent que leur activité n’est pas ou peu essentielle et que pour 10% elle aurait pu s’exercer en télétravail.
Si l'on ajoute à cela le fait que 93% d'entre eux disent n'avoir pas d’alternative à l’utilisation des transports en commun, on voit se profiler pour la période de déconfinement progressif le spectre d'une aggravation des conditions de travail de ceux devant aller sur site et donc d'une fracture profonde avec ceux qui auront eu la chance de pouvoir travailler chez eux.
Le panorama met en exergue la surexposition des femmes et que 36% des femmes ont subi une hausse de la charge de travail (contre 29% des hommes) alors que la fermeture des écoles s’est traduite pour 43% d’entre elles par plus de 4h de tâches domestiques supplémentaires. Le confinement a été facteur de tensions pour 20% des couples, et de violence pour 2% des répondants.
2. Télétravail “en mode dégradé”
La mise en place d’un télétravail “en mode dégradé” : un tiers des télétravailleurs n’ont pas été dotés par leur employeur en équipement informatique, près de 80% ne disposent pas de droit à la déconnexion, 97% n’ont pas d’équipement de travail ergonomique, un quart n’ont pas d’endroit ou s’isoler et un tiers, notamment les femmes, doit télétravailler tout en gardant les enfants. Ces conditions de travail génèrent d’importants risques psychosociaux, 35% des télétravailleurs se plaignant d’une anxiété inhabituelle et près de la moitié de douleurs physiques.
3. "Telemanagement" encore balbutiant
Un "telemanagement" encore balbutiant dans le cadre de bureaux organisés chez soi avec les moyens du bord et de conditions de travail non clairement définies : Pour plus de 8 répondants sur 10, l'employeur n'a pas défini de plages horaires de travail précises, ni de droit à la déconnexion organisé et pour plus de 80 % des parents d'enfants de moins de 16 ans (majoritairement des femmes), il n'y a pas eu de réduction du temps et de la charge de travail, un tiers des enquêtés (40 % des cadres) a même noté sa hausse.
4. Malaise de l'encadrement
Un bilan confirmé par l’encadrement qui exprime un réel malaise : interrogé sur les mesures mises en place par les employeurs, les encadrants ont confirmé les tendances données par les salariés directement concernés. 55% considèrent que la poursuite d’activité en présentiel constitue un risque de contamination des salariés et de la population, 3 sur 10 que les activités en présentiel pourraient être limitées. La difficulté à maintenir un collectif de travail à distance est aussi pointée, avec un fort sentiment d'isolement, près de la moitié des télétravailleurs interrogés se sont plaints d'un manque de contacts avec leurs collègues ... ainsi pour 27 % du même manque vis-à-vis de leur hiérarchie.
5. Difficulté à manager
La difficulté de manager des équipes en télétravail conduit 40 % des encadrants répondants à pointer une hausse de leur charge de travail et de leur temps de travail. Le surplus d'informations à traiter (pour 33% des repondants) liés notamment à la sur-abondance de mails venant sans doute palier l'absence de relations physiques a renforcer la pression psychique qui s'est doublée pour 18 % de dilemmes éthiques. Le signe d'un malaise que les directions ont tout intérêt à ne pas ignorer.
Chez Changers nous pensons qu'avec le déconfinement le plus dur reste à venir et qu'il risque de rimer avec décompensation.
Aussi avec le programme ReStart by Changers avons nous bâti un dispositif susceptible de permettre :
- d’écouter ce qu’ont vécu les équipes et les managers,
- d’ouvrir un canal d’échange entre ceux qui sont demeurés sur site et les teletravailleurs, et favoriser l’engagement des collaborateurs sur le terrain,
- de définir avec les télétravailleurs les pistes d’améliorations et les bonnes pratiques et d’ajuster l’offre et les process,
- de co-construire les nouvelles pratiques manageriales et organisationnelles permettant d’optimiser la période de déconfinement.
Photo : Andrew Neel